Enark Fanlune du Lac, de la maison d’Avaugour, avançait en tête, fier de son rôle dans la prise du site. À ses côtés, Fergus de Retz, épée à la hanche, jaugeait l’endroit d’un regard méfiant, prêt à intervenir si une menace se manifestait, il détestait ses montagnes qui lui avaient valu quelques mauvaises rencontres. Quant à Archibald et Alaid d’Ancenis, toujours impeccablement habillés malgré la rudesse du terrain, ils échangeaient des murmures sur la rentabilité des opérations minières futures.
Isali et Alisa Fanlune, les filles d’Enark, suivaient leur père, veillant à ses arrières. Enfin, Enguerrand de Virou et Armand Braisefer, guerriers reconnus, fermaient la marche. Ils avaient acquis une grosse partie de la mine en doublant Vauned avec haut-rempart sur les parts allouées à celle-ci.
Les premiers rapports des contremaîtres envoyés dans les galeries confirmaient la richesse de la mine. Avaloniens et habitants de Haut-Rempart se frottaient les mains, les coffres des deux territoires allaient se remplir, consolidant leur influence sur la région. Une alliance fragile se nouait autour de cette opportunité commune, même si chacun savait que des intérêts divergants pourraient rapidement diviser les deux parties et même plusieurs maisons dans ces factions.
Le Prince d’Avalon, arrivé pour constater les résultats des efforts de ses chevaliers, déclara avec enthousiasme.
— Cette mine est un symbole de la résilience et de l’unité d’Avalon et de Haut Rempart. Puissions-nous en faire un levier pour la grandeur de nos nations !
Alors que la délégation célébrait la future mise en œuvre, le grondement sourd d’un cor retentit dans la vallée. Bientôt, un cortège de duergars en armes, portant les bannières du Haut-Roi Grimnar Merdrirak, apparut au détour d’un sentier escarpé. À leur tête, un intendant duergar, vêtu de riches étoffes brodées, marchait aux côtés de plusieurs scribes et comptables portant des registres épais.
Le chef des duergars, une figure imposante répondant au nom de Tharnick Tonneau-gris, s’avança avec assurance. Sa voix grave et rocailleuse résonna dans l’air frais.
— Écoutez-moi bien, grands pontes d’Avalon et de Haut-Rempart ! Vous mettez les bottes sur une terre que le Haut-Roi Grimnar Merdrirak revendique en son nom. Cette mine, c’est notre fierté, à nous autres Duergars ! Elle nous appartient depuis des siècles, même si les idiots avant nous l’ont laissée sombrer dans l’oubli.
Un murmure de grondement courut parmi les nobles d’Avalon. Tharnick leva une main apaisante avant de poursuivre :
— Cela dit, on reconnaît vos efforts pour garder ce lieu à l’abri. L’alliance qu’on a forgée avec votre peuple sur le vieux continent pour botter le derrière des démons, c’est un acte d’honneur, et vous avez toujours tenu parole là-dessus. Plutôt que de nous quereller pour cette mine, voilà ce qu’on propose : un accord commercial. Vous payez une redevance annuelle et une part des profits, et en échange, vous profitez de notre savoir-faire minier, de nos maîtres artisans et de nos réseaux. Et on passera par Baraz-Dum pour s’assurer que vous soyez équipés comme des vrais gratte-terre.
Les membres d’Avalon et de Haut-Rempart échangèrent des regards. La perspective d’un conflit avec le Haut-Roi duergar était peu attrayante, surtout compte tenu des ressources qu’ils pouvaient apporter. Enark, toujours stratège, regarda son prince acquiescer à son regard et il prit la parole.
— Votre proposition est intéressante, Tharnick Tonneau-gris. Donnez-nous quelques jours pour en discuter avec nos conseillers. Nous pourrions bâtir ici quelque chose de grand, une véritable coopération entre vos montagnes et nos terres. Afin d’apporter l’ordre et la civilisation en ces terres comme nos ancêtres l’ont fait ensemble sur Frayir.
Tharnick hocha la tête, satisfait de cette réponse mesurée.
— Très bien. On plantera un campement temporaire près de la rivière. Faites-nous savoir votre décision sans trop traîner.
Alors que les duergars se retiraient pour établir leur base, les nobles d’Avalon et de Haut-Rempart commencèrent à débattre. L’offre semblait alléchante, mais elle impliquait de partager les richesses de la mine, une idée qui déplaisait à certains jeunes gens du groupe. D’autres, plus pragmatiques et plus affinés dans la politique, connaissaient très bien les duergars, ils voyaient dans cette entente une opportunité d’éviter un conflit politique coûteux tout en tirant parti du savoir-faire duergar, de la technologie à vapeur et de fonder une alliance durable entre les différentes factions sur Obéon.
Le destin de la mine était désormais entre leurs mains, et avec lui, l’avenir de cette alliance fragile entre Avalon, Haut-Rempart, et l’empire duergar de Frayir.
Le lendemain, l’assemblée se rendit de nouveau devant les portes de la mine pour discuter des termes. Mais arrivé sur place, quelle ne fut pas leur surprise. La mine était condamnée et l’entrée s’était effondrée. Tous se regardèrent et tombèrent des nues … Les voix commencèrent à monter jusqu’à ce qu’un ingénieur duergar se rapproche et lève la main devant l’assemblée.
— C’est du sabotage, cette entrée a été scellé à coup de piques et de pioches, tout s’est effondré et il faudra des mois pour de nouveau enlever les gravats “
Les membres d’Avalon et de Haut-Rempart se regardèrent avec questionnement, la plupart d’entre eux avait passé leur soirée avec les duergars et ils n’étaient donc pas responsables de ce vice. Les hommes bêtes et les hommes insectes ne possèdent pas non plus cette technologie et ces outils et aucune intrusion n’a eu lieu sur les territoires. Qui a bien pu faire ça ? Y aurait-il des traîtres ou des parvenus ? Toute cette histoire est à tirer au clair et vite.