Mise en situation : Opus 2 (An 153)

Soif de pouvoir et soif de sang, ces deux gants saillent aux mains des belligérants. Le nouveau châtelain de Bélême et autoproclamé libérateur, Guernot, termina son banquet de victoire sur la prise de la châtellerie avec un goût de liberté amer. Pour cause, après avoir fait irruption pendant les festivités, un casus belli venant de la part du légat de la légion auxiliaire de Caer Khol lui a été imposé. D’une part pour lui montrer le niveau de son affront envers le roi elfe Feldar et d’autre part pour laver les affronts que ses nouveaux gens ont faits envers le culte du Céleste. C’est ainsi que des règles d’engagement furent dictées avec l’aval de toutes les factions présentes ; en ce jour naquirent les braises du conflit en Obéon.

Peu après le banquet, les factions, renforcées par l’affaiblissement de la châtellerie et par les appels du pied des deux belligérants, se sont vues offrir des terres et se sont donc installées de toute part dans la province. Chaque faction, malgré la difficulté de leur situation, s’est armée de pelles et de pioches. Ils ont posé chacun de leur côté, sur cette terre étrangère et inhospitalière, les premières pierres de leurs civilisations. 

Se regardant chacune en chiens de faïence, ils savaient que le jour arriverait où le fracas de l’acier allait remplacer les faux sourires et les courbettes. Chacun, dans son for intérieur, se répétait que ce serait à eux de dicter leurs propres conduites, que ce seraient eux les maîtres de ce continent. Mais après tout, pouvons-nous leur donner tort ? Ceux qui ne combattaient pas assez pour leur survie finiraient comme la nouvelle-vry, faibles, anéantis et écrasés. La loi du plus fort n’épargne personne en Obéon, et ne laisse pas de pitié aux traînards. Ils se tournèrent alors vers la seule chose qui pouvait bâtir efficacement leur hégémonie en cet instant fatidique : l’arrivée de nouveaux colons au sein de leur patrie. 

Depuis Port-Argent, le seul bastion elfique de Caer Khol et seul point de passage viable en Obéon, la vague migratoire, bien que réduite par les conflits en cours, continue de déverser un flot incessant de colons. Ces nouveaux arrivants intéressent aussi tout particulièrement Caer Khol, qui en profite pour enrôler les plus volontaires dans la légion auxiliaire. Pour éviter ce désagrément, certains n’hésitent pas à passer par des réseaux peu scrupuleux, qui se sont renforcés depuis la prise de la châtellerie.

Arrivés à Bélême, ces gens se retrouvent alpagués par les recruteurs et les concessionnaires des diverses factions, luttant pour attirer le plus de démographie au sein de leur faction. Une situation qui commence à tendre Guernot, voyant le contrecoup de sa décision face à cette redistribution de population massive. La construction de leurs nations était une machine gourmande et avare en ressources. Ils commencèrent à exploiter les terres environnantes et à attirer l’attention de leurs propriétaires.

Ni une, ni deux, les hommes-bêtes désorganisés mais nombreux, rusés et impitoyables, lancèrent des raids aux caravanes et aux nations récemment établies. Ils frappèrent avec une férocité calculée, disparaissant dans les ombres de la forêt et des collines avant de réapparaître ailleurs, jouant avec les nerfs et le mental de leurs victimes. La peur et la vigilance constante devinrent les compagnons des colons, chaque craquement de branche pouvant annoncer une attaque, chaque bruissement dans les feuillages évoquant un murmure. Les enlèvements et les cris venant de la forêt sont maintenant une chanson macabre qui vient parfois remplacer le chant du coq au petit matin…

Quant à ceux qui se sont installés près des montagnes comme le Maelstrom et qui se pensaient à l’abri, eux, souffrent de vols et pillages constants de nourriture ainsi que de vols de nourrissons. Le problème est que cette menace, contrairement aux hommes-bêtes, se déplace en creusant des galeries, et agit de préférence à l’abri des regards, ne laissant que des traces de pattes griffues au sol. On raconte que les mères éplorées se retrouvent les bras ballants face à des berceaux écarlates ou quand ce ne sont pas certaines parties du corps de leur progéniture qui manquent, c’est le corps entier.

C’est dans cette ambiance délétère que tous se préparent aux affrontements qui vont suivre, Bélême sera tel un gigot qu’on aurait lancé à une meute de loups affamés, et à moins d’un miracle chaque faction va se repaître de sa chair encore une fois. Car malgré la tour de Narbogne en ruine et les ateliers saccagés, les maladies qui courre depuis l’année dernière, il est sot de ne pas penser que Bélême n’intéresse pas les nouveaux seigneurs des territoires alentours, de part sa richesse, sa position et la facilité à commercer et à régler ses comptes.

Guernot le renégat contre le légat elfe. Tout cela promet une belle réjouissance. Le cinquième âge, l’âge du soleil, est sur le point de s’embraser. Les pions sont en place, l’échiquier est posé, il ne reste plus qu’à avancer, ou trépasser.

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